France Info, le jeudi 14 octobre 2010.
Robert Badinter : Ma position est très claire, très claire: le Parlement n’a pas à dire l’histoire. Le Parlement fait l’histoire, il n’a pas à la dire, il n'a pas à la fixer. Les lois mémorielles, que j’appelle d'ailleurs des lois compassionnelles, qui sont faites pour panser des blessures, apaiser des douleurs - et je comprends ça parfaitement - mais elles n’ont pas leur place dans l’arsenal législatif. La loi est une norme. La loi a pour fonction de réglementer une société, de prévoir son avenir. Elle n’a pas à prendre parti dans une querelle historique ou tout simplement à affirmer un fait historique même indiscutable. J’ajoute, il faut bien le prendre en compte : la Constitution ne le permet pas. Je le dis clairement, elle ne le permet pas ! La loi en France n'est pas comme en Angleterre, le Parlement ne peut pas tout dire. Le Parlement a une compétence d’attribution, et rien ne permet, au regard de la Constitution, au législateur de s’ériger en tribunal de l’histoire. Rien. Par conséquent je comprends très bien les passions et le désir des élus de panser les blessures et de faire des lois compassionnelles : ça n’est pas la finalité du Parlement et constitutionnellement, c’est hors de la compétence du Parlement.